Paul Plouviez (1905-1942)

  • État civil : 24.10.1905 Bruay-en-Artois | 28.12.1942 Arras (fusillé à la Citadelle)
  • Profession : mineur
  • Organisation :Parti communiste, CGT clandestine, OSC, FTP
  • Pseudonyme : Charles Ernest
  • Fonctions : organisation, propagande syndicale, sabotage
  • Distinctions : Chevalier de la Légion d’Honneur à titre posthume

Paul François Joseph Plouviez est né à Bruay-en-Artois, en la cité 6, le 24 octobre 1905, fils d’Amédée et de Marie Lebas, d’un milieu de mineurs. À l’issue de ses études primaires, en octobre 1918, il commence à travailler à la mine malgré un apprentissage en maçonnerie. Il n’a pas effectué son service militaire quand il épouse, le 12 avril 1924, Marie-Louise Lefort, avec laquelle il aura deux filles, dont l’aînée décède de méningite, en bas âge. Il fait son service militaire de novembre 1925 à novembre 1926, au 3e régiment du génie d’Arras, comme sapeur-mineur.

Son engagement politique

En 1934, il adhère au parti communiste français où il se montre très dynamique. Dès l’année suivante, il devient responsable du syndicat des mineurs (CGT), et organise des grèves pour améliorer les conditions de travail des ouvriers. En 1936, délégué à la Fédération des Syndicats des Mineurs de la Concession de Bruay, il s’oppose avec Louis Dussart aux autres dirigeants (notamment Henri Cadot, député-maire de Bruay de 1919 à 1944, président du Syndicat des Mineurs du Pas-de-Calais, et Ernest Wéry, l’adjoint de Cadot). Afin de répondre à la demande des responsables, au vu du nombre croissant d’adhérents (auquel il contribue), il créée une 2ème cellule du parti communiste à Bruay, et en devient le secrétaire (la 1ère est dirigée par Louis Dussart). Il s’initie à la Libre Pensée, et la prône auprès de ses camarades. Il devient secrétaire du Secours Populaire, et pendant la guerre d’Espagne, il sera animateur du Comité d’Aide à l’Espagne républicaine. Il reçoit aussi le 22 novembre 1938, une autorisation préfectorale de colportage (livres, journaux, brochures, photos…). Il est membre du Comité de Diffusion de l’Humanité, qui regroupe les militants communistes qui vendent bénévolement ce journal. Il vend également des cartes postales pour soutenir les Républicains espagnols.

Un rôle précoce dans l’organisation de la résistance communiste

Dès le début de l’Occupation, il rejoint le parti communiste clandestin et réorganise les cellules clandestines de Bruay, Divion, Houdain et Haillicourt. Il y mène une activité politique et syndicale intense en distribuant en particulier L’Enchaîné, hebdomadaire régional du PCF, et L’Humanité. Peut-être participe-t-il à des actions directes précoces contre l’occupant. Il est arrêté le 8 octobre 1940 par le commissaire Dadon, de la police de Vichy, et on découvre chez lui un duplicateur et des tracts de propagande intitulés Le Prolétaire. Il est condamné le 12 octobre 1940 à six mois de prison, une peine qu’il purge à Béthune. Il est libéré – ou s’évade peut-être ? – le 23 février 1941. Dans le même temps, la Compagnie des Mines de Bruay l’expulse de son logement puisqu’il est renvoyé.

Il reprend toutefois ses actions dans le syndicalisme illégal, et réorganise les cellules syndicales de Bruay et ses alentours. Pour célébrer le 1er mai, il participe à la fabrication des papillons et drapeaux aux couleurs communistes, qui orneront les fils électriques, terrils et monuments aux morts. Au début du mouvement de grève des mineurs du Pas-de-Calais, il est de nouveau arrêté le 3 juin 1941 par le commissaire Dadon et ses gendarmes, mais il parvient à s’échapper grâce à l’aide d’une voisine. Il se résout à quitter son foyer pour échapper à la police, mais reste dans les environs, et retrouve sa famille et ses amis sous divers déguisements. Il entre alors dans l’illégalité. Jusqu’au 12 juin, il organise la grève des mineurs à Bruay, Divion, Haillicourt, pour 7 jours de cessation d’activité. Il prend la tête du syndicat illégal sur Béthune, Bruay et Auchel, et entreprend avec d’autres responsables de reconstituer des Comités d’unité syndicale et d’action, afin de regrouper les activités dans les communes voisines de Bruay, Noeux et Béthune.

Après l’invasion de l’Union soviétique, il entre, avec ses camarades Gaston Blot et Henri Duriez, dans une équipe de l’Organisation Spéciale Communiste (FTP en avril 1942), dont il devient en août 1941 le responsable S pour le secteur A de Béthune. Cette équipe se montre très active dans le domaine des sabotages, de la fin juin 1941 à juillet 1942 : destruction de pylônes électriques à Gosnay et Marles (juin 1941), de deux tonneaux d’huile et de pétrole, coupures de raccords de freins immobilisant 22 wagons (juin 1941), sabotage des aiguillages et remises de machines à la gare de Fouquereuil, rendant le matériel inutilisable pendant plusieurs jours (juillet 1941), de boîtes à huile pour wagons, immobilisant 10 wagons (novembre 1941), de l’écluse d’Aire-sur-la Lys (début 1942), de voies ferrées à Béthune et Fouquereuil (février 1942), de la voie ferrée de Tincques (28 mars 1942), de lignes téléphoniques à Béthune, Bruay et Auchel (juillet 1942). À ces sabotages s’ajoute une tentative d’assassinat sur la personne de Brebion, secrétaire de police de Bruay, le 19 décembre 1941. À partir de décembre 1941, sa femme et sa fille trouvent refuge chez une tante de son épouse, au 35 de la rue Victor Hugo.

Condamné à mort pour terrorisme et propagande

Vivant dans l’illégalité, se déplaçant de cache en cache, il est dans le colimateur de la police française qui depuis septembre cherche à l’interner. Il est arrêté le 28 août 1942 à Annezin, alors qu’il se cache chez Henri Duriez, dont la maison sert de cachette aux FTP du secteur. Les gendarmes béthunois Caron et Pecqueur lui tirent dans les jambes, puis il est roué de coups pendant son transfert à la prison de Béthune. Il y passe huit jours, y est battu par les gardiens Delporte et Parent, puis il est remis aux autorités allemandes. Il est incarcéré à la prison Saint-Nicaise d’Arras pour « menées communo-terroristes et propagande », et il est torturé pendant quatre mois, sans rien avouer. Il veut bien reconnaître son activité politico-syndicale, mais nie toute participation à des sabotages, et surtout à la tentative d’exécution de Brebion en décembre 1941. Il espère ainsi sauver sa tête, mais le tribunal militaire d’Arras (OFK 670) le condamne à mort le 8 décembre 1942. Il est fusillé dans les fossés de la citadelle le 28 décembre 1942 à 16 h 06, en même temps que Marceau Suchet et Joseph Bernard. Il est enterré dans une fosse commune. Son corps sera exhumé et rapatrié à Bruay le 4 octobre 1944.

La reconnaissance de ses camarades, de sa ville et de la Nation

À titre posthume, le 4 mars 1947, il reçoit le grade honorifique de capitaine FTPF, avec une date de prise de rang au 1er août 1942. Le 30 septembre 1959, il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur. La ville de Bruay-en-Artois l’honore en lui dédiant le nom d’une avenue. Son épouse Marie-Louise s’est également montrée active dans la Résistance : diffusion de presse patriotique, hébergement de résistants, collecte de vivres et de médicaments, camouflage de matériel de sabotage… En mai 1945, elle fait partie des premières femmes à être élues au conseil municipal de Bruay.


Sources & Bibliographie :

  • Archives privées de Judith Lejeune
  • SHD GR 16 P 482264
  • Archives départementales du Pas-de-Calais, M 5022, 2655 W, dossier CVR 12404
  • Notice de Christian Lescureux, Dictionnaire des fusillés- Maitron

Auteurs : Judith Lejeune, arrière-petite-fille de Paul Plouviez, et René Lesage